from the book
Trois ans après sa disparition, Brave-Vent, que l’on croyait mort d’une maladie honteuse et incinéré vivant dans un crématorium en Grèce sinon livré aux aigles du Tibet, était de retour dans un attelage qui lui restitua ses titres de prince de Tarédant, commandeur du Vent, docteur honoris causa, etc. Il était au volant d’une automobile à quatre roues protégées par des pare-chocs si lascivement et généreusement dessinés qu’ils séduisirent les grands nostalgiques de l’époque négrière de la ville. Le véhicule avait des sièges rembourrés, des phares globuleux peints en bleu contre le mauvais œil, et un marchepied dépliable. Vaincu par le sirocco, le moteur s’était éteint entre Mazagan et Mogador et la voiture avait parcouru une centaine de kilomètres attelée à tout un équipage de dromadaires et de mules. Cette merveille de Dieu promettait de ranger Tarédant parmi les villes les plus civilisées du Maroc. Brave-Vent fit une entrée triomphale dans la ville. Il saluait les habitant de la main. De droite et de gauche. Il clamait: “Je suis de retour pour toujours, je me langui de vous, Rédanais, vous m’avez manqué!”